Ils y ont cru. Ils ont signé, payé, attendu. Et ils attendent encore. Cinq ans après leur achat en VEFA (Vente en l’Etat Futur d’Achèvement), une dizaine de familles qui avaient misé sur la Résidence des Amandiers, à Héricourt en Haute-Saône, sont toujours dans l’expectative. Des appartements quasiment payés, mais inhabitables. Des promesses sans cesse repoussées, des dates de livraison qui s’empilent sans jamais se concrétiser. Résultat : des propriétaires coincés entre crédit immobilier, loyer provisoire et espoirs qui s’effritent au fil des mois. Pourtant, le promoteur assure que tout va bien et que la remise des clés est imminente. Mais ça fait combien de fois qu’on leur dit ça ? Fort heureusement, tous les promoteurs ne sont pas logés à la même enseigne à ce niveau… Antony Rooftop – Cibex Pierre Étoile en est la preuve. Décryptage !
Un projet immobilier qui vire au cauchemar
L’histoire commence entre 2020 et 2021. Une dizaine d’acquéreurs, séduits par un programme immobilier moderne en plein centre-ville, signent sans trop hésiter. L’emplacement est idéal, les commodités nombreuses, le projet semble solide. Sur le papier, tout est réglé comme du papier à musique : la livraison est prévue pour le premier trimestre 2021. Seulement voilà, quatre ans plus tard, rien n’a bougé, ou presque.
Claude, l’un des propriétaires, a vendu sa maison dans la Marne pour venir s’installer dans ce qui devait être son nouveau chez-lui. Aujourd’hui, il vit dans un appartement de location, ses meubles s’entassent dans un garde-meuble, et il commence à désespérer. Son fils Thierry ne cache plus son amertume. « On savait qu’il pouvait y avoir quelques mois de retard. Mais pas quatre ou cinq ans. A ce rythme, on n’aura jamais notre appartement. » Sur place, le spectacle est affligeant. Un chantier qui semble figé, des façades inachevées, des appartements qui manquent encore de portes, de peinture, d’ascenseurs. La dernière visite d’expert mandaté par la justice ne fait que confirmer l’ampleur du problème.
Une impasse financière et psychologique
Si l’attente est difficile, elle est surtout un gouffre financier pour les acquéreurs. Acheter un appartement, c’est souvent un parcours du combattant. Les banques demandent un apport conséquent, les taux d’intérêt ne sont pas des cadeaux, et la plupart des acheteurs doivent jongler entre rembourser leur prêt et payer un loyer en attendant de pouvoir emménager.
Pour Stéphanie May, l’histoire est encore plus tragique. En 2021, elle et son mari ont acheté un appartement pour sa tante, en situation de handicap, avec la promesse d’une installation rapide. « On nous avait assuré que tout serait prêt en quatre mois. » Quatre ans plus tard, la tante est décédée. Et Stéphanie se retrouve avec un appartement qu’elle n’a plus aucune raison d’occuper, mais pour lequel elle a déjà réglé l’essentiel de la somme. D’autres propriétaires, excédés par les reports à répétition, ont décidé d’attaquer en justice la société Anthéus Promotion, chargée du projet. Une plainte a été déposée en 2022. Mais en 2025, ils attendent toujours une décision. Un expert a été mandaté pour suivre l’évolution des travaux, mais chaque rapport témoigne d’un chantier au ralenti.
Et le promoteur, il dit quoi ?
Baki Toklu, président d’Anthéus Promotion, ne se démonte pas. Selon lui, les retards sont liés à des « facteurs indépendants » de sa volonté : faillites de certaines entreprises intervenantes, crise immobilière, et même retards de paiement de certains acquéreurs. Le refrain est connu, mais il passe mal. Pour les propriétaires, c’est un énième écran de fumée. Anthéus Promotion promet une livraison imminente. Une phrase qu’ils ont déjà entendue des dizaines de fois. A ce stade, les propriétaires n’y croient plus.
Un marché qui tente de se relancer
Si cette affaire illustre parfaitement les risques que peuvent encourir certains acheteurs, il serait erroné de penser qu’elle est représentative de tout le marché immobilier neuf. En effet, la plupart des promoteurs tiennent leurs engagements et livrent leurs projets en respectant les délais annoncés. Mais les retards, lorsqu’ils surviennent, peuvent transformer un projet de vie en véritable bourbier.
Pour tenter de redonner confiance aux acquéreurs, le gouvernement a intégré dans la loi de finances 2025 une exonération fiscale temporaire sur les donations immobilières destinées à financer l’achat d’un logement neuf. Un coup de pouce bienvenu, notamment pour les jeunes primo-accédants. Concrètement, un parent ou un grand-parent peut désormais transmettre jusqu’à 100 000 € à un enfant ou un petit-enfant sans que cette somme soit imposable, à condition qu’elle soit utilisée pour l’achat d’un logement neuf. Ce plafond peut grimper jusqu’à 300 000 € si plusieurs donateurs contribuent. Une seule condition : le logement doit être destiné à la résidence principale du bénéficiaire et conservé au moins cinq ans.
L’initiative ne concerne pas seulement l’achat immobilier. Elle s’applique aussi aux travaux de rénovation énergétique, un axe prioritaire du gouvernement. L’aide MaPrimeRénov’ entre en jeu pour accompagner ces projets.
Rétablir la confiance dans l’immobilier neuf
Si l’exonération fiscale apporte une bouffée d’air frais aux acheteurs, elle ne réglera pas tout. Ce que recherchent les acquéreurs, c’est avant tout de la sécurité et de la transparence. Acheter sur plan demande déjà une bonne dose de confiance. Quand les délais s’étirent sur des années, c’est toute la crédibilité du secteur qui vacille. La Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI) salue l’initiative gouvernementale mais rappelle que le nerf de la guerre reste la fiabilité des projets. Il ne suffit pas d’inciter les Français à acheter, encore faut-il que les programmes immobiliers tiennent leurs engagements.
Pour les propriétaires de la Résidence des Amandiers, l’enjeu est simple : récupérer leur bien et tourner la page d’un feuilleton qui a trop duré. Mais à quel prix ?





