La trêve hivernale est un dispositif qui permet chaque année d’interdire aux bailleurs toute expulsion d’un locataire. En effet, être expulsé de son logement est déjà en soi une terrible épreuve, mais c’est encore plus le cas pendant les mois d’hiver. Locataires et bailleurs doivent avoir connaissance de cette trêve hivernale pour savoir quels sont leurs droits et obligations. Le point sur le sujet avec maître Antoine Beraud, avocat au barreau de Marseille.

Les caractéristiques de la trêve hivernale

La trêve hivernale interdit toute expulsion d’un locataire pendant cinq mois, à savoir du 1er novembre au 31 mars depuis la loi Alur (loi pour l’Accès au logement et à un urbanisme rénové). Auparavant, la trêve se tenait en effet jusqu’au 15 mars. Toutefois, 2020 est une année particulière : du fait de la pandémie mondiale inhérente au Covid-19, la trêve a été reportée à titre exceptionnelle jusqu’au 10 juillet. Il est par ailleurs à noter que les fournisseurs d’énergies (électricité, eau, gaz) ne peuvent pas couper ces ressources pendant cette période (mais ils peuvent toutefois soumettre le locataire à une réduction de puissance).

L’expulsion est un dispositif possible, sous certaines conditions, dans le cas où le locataire ne respecte pas les règles inhérentes à son bail. Cela concerne essentiellement les cas de non-paiement du loyer mais aussi des charges, d’un défaut d’assurance, du non-versement du dépôt de garantie, ou encore de dégradations du bien ou de trouble au voisinage.

La trêve hivernale ne peut toutefois s’appliquer si un logement de remplacement adapté pour le locataire et sa famille est prévu. C’est également le cas si les locaux font l’objet d’un arrêté de péril.

De même, il faut savoir que les squatteurs sont exclus de la trêve hivernale depuis la loi ELAN (pour Evolution du logement, de l’aménagement et du numérique).

Les recours d’un bailleur pendant la trêve hivernale

Il est important de se faire conseiller par un avocat spécialisé en droit locatif, que vous soyez locataire ou propriétaire. La trêve hivernale est en effet définie par les articles L 412 à L 412-8 du Code des procédures civiles d’exécution.

Un bailleur ne peut en aucun cas procéder lui-même à l’expulsion, au risque d’avoir de lourdes sanctions allant jusqu’à 3 ans de prison et 30 000 euros d’amende.

Le bailleur n’est toutefois pas sans ressource, et il peut tout de même poursuivre une procédure visant son locataire (si cela est bien évidemment justifié). La trêve hivernale permet en effet de bloquer les expulsions mais pas les procédures ! Il peut ainsi envoyer à son locataire un commandement à régler pendant la trêve hivernale ou encore demander un jugement d’expulsion si le locataire n’a pas régularisé sa situation dans les deux mois qui suivent le commandement reçu.

Si l’expulsion est au final accordée par le juge du contentieux et de la protection (JCP) du Tribunal Judiciaire, elle se tiendra alors après la trêve hivernale, à compter donc du 1er avril.