Au XVIII° et XIX° siècle, ce sont les anglais, les irlandais, les allemands et les danois qui ont investis les grands crus classés de Bordeaux. Au vingtième siècle, deux vagues se sont succédées avec les Américains et les Belges. Dans les années 70, ce sont presque 30 propriétés plus ou moins connues qui sont passées aux mains des Japonais. Aujourd’hui, ce sont les Chinois qui investissent. C’est connu, les Chinois ont de l’argent, beaucoup d’argent, ils aiment les vins et les affaires. Nombre d’entre eux arrivent à Bordeaux dans l’espoir d’acheter le Château » de la Belle au Bois dormant. Ils sont prêts à débourser des sommes importantes pour être le plus grand et le plus gros producteur. C’est une question d’image et de prestige.

A ce jour près de 100 propriétés ont changé de main et nous ne sommes surement pas au courant de l’ensemble des transactions. Nous tenons une liste à jour en fonction des informations que nous connaissons.
Les Chinois s’intéressent à Bordeaux parce que Bordeaux reste la capitale mondiale du vin et que le prix des propriétés y est relativement bas dans les appellations « chassées » par les Chinois. Le beau château n’étant pas forcément compatible avec grande appellation ou en tout cas pas dans le cadre d’un budget oscillant entre 5 et 10 M€.
Pour que les candidats à l’investissement en territoire bordelais comprennent parfaitement ce que nous leur proposons, nous avons mis en place un « pool de compétences » qui regroupe l’ensemble des experts qu’ils se doivent de rencontrer pour se faire une bonne opinion (positive ou négative) de la propriété qu’ils ont l’intention d’acheter.
Cela leur permet d’ailleurs par la suite de prendre comme conseil les meilleurs prestataires locaux reconnus de tous et avec qui ils vont mettre en place une stratégie qui correspondra par la suite aux produits recherché par le client pour le marché chinois.
Souvent les projets d’acquisition de vignobles sont étroitement liés avec un projet oenotouristique ou le futur acquéreur projette de pouvoir recevoir ses propres clients dans le cadre d’un château historique.
Les projets de chacun sont parfois raisonnables, mais parfois complètement farfelus. C’est bien à nous de les mettre en garde et de leur expliquer les tendances et le marché actuel. Rien ne sert de construire un palace pour des clients locaux qui ne seront pas forcément une cible potentielle.

Les Chinois veulent TOUT visiter, tout voir et négocient TOUT. Ce n’est pas forcément évident de pouvoir leur proposer des vignobles quand les prix sont peu négociables. L’ensemble des prestataires s’est adapté à cette forme d’acquisition et malgré la crise, les prix sont restés raisonnables tant pour les vendeurs que les acheteurs.

Une grande majorité de chinois fuient la publicité et ne souhaitent être cités. Vivons heureux, vivons cachés. La presse ne parle que de ceux qui souhaitent être mis en avant et c’est bien ainsi car en général, ils ne viennent à Bordeaux que pour prendre des décisions importantes et ne passent que quelques jours pour gérer leurs investissements. Il n’est pas rare que les voisins eux même ne sachent pas que leur voisin est passé aux mains étrangères.

Les chinois n’achètent pas que des propriétés. Ils sont également friands de grands crus et ils veulent tous acheter quelques grandes bouteilles souvenirs avant de repartir. Chacun a ses adresses et ils nous demandent de les accompagner. Ils ressortent des magasins avec un sourire indescriptible, emportant qui, quelques rares flacons de Margaux ou de Lafitte Rothschild, qui d’autres crus dont ils connaissent le nom. Ces acheteurs sont des consommateurs avertis qui connaissent les prix et s’amusent à nous faire gouter des millésimes anciens.

Bref, les chinois achètent, recrutent des directeurs capable d’assurer un reporting régulier, investissent lourdement dans les vignobles, les chais et les châteaux.

Les Chinois s’acclimatent parfaitement bien. Nous leur expliquons les règles, les us et coutumes et les lois s’il le faut. Ils s’adaptent souvent en s’étonnant de l’importance du social. Ils apprennent donc beaucoup sur le tas et sont avides de comprendre afin de respecter les lois fiscales et sociales.

Les chinois n’achètent pas qu’à Bordeaux, ils investissent partout où l’on produit du vin : en Nouvelle Zélande, en Australie, en Afrique du Sud, en Europe au Portugal, en Espagne en Italie et en France dans toutes les régions de production mais très spécifiquement, Bordeaux, Cognac, Bourgogne, Languedoc et Provence.

Les Chinois sont également de grands producteurs de vins depuis des siècles et certaines grandes maisons comme Changyu sont implantées depuis la fin du XVIII° siècle. De grands projets de plantation sont en cours, mais si la Chine actuelle multiplie sa consommation de vins actuelle (0.8 litre par personne) par 5, la seule production mondiale actuelle ne suffira pour la seule consommation Chinoise. Voilà qui est inquiétant et rassurant à la fois.

J’encourage tous à voir le film « Red Obsession » qui présente parfaitement cet engouement de la Chine pour les vins de Bordeaux.